La mobilisation contre la mise en place d’une consigne sur les bouteilles en plastique relancée par le Gouvernement se poursuit et s’intensifie. Une conférence de presse réunissant l’ensemble des associations françaises de collectivités locales s’est tenue au siège de l’Association des Maires de France (AMF) le 18 avril dernier. Ces associations, constituées en plateforme depuis plusieurs semaines, ont présenté un front uni et des propositions cohérentes contre l’instauration de cette « fausse consigne » qui met en danger le service public de gestion des déchets et in fine pourrait s’avérer être contre-productif au regard des objectifs visés.
Suite aux 14 propositions formulées par la plateforme et destinées à accroitre les performances du tri et de la collecte, le ministère de la Transition écologique semble sortir des scénarii du « avec » ou « sans » consigne, ainsi que celui portant sur la consigne pour réemploi. Le ministère propose ainsi d’élargir le débat aux enjeux plus globaux des emballages et de faire un lien avec la révision à venir du cahier des charges des éco-organismes en charge des déchets des emballages. Le ministre de la Transition écologique a annoncé qu’il recevra les associations de collectivités le 16 mai, l’occasion d’un « point d’étape sur les concertations en cours ».
Le 12 mai se tient la concertation régionale francilienne sur la mise en place d’une consigne pour recyclage des bouteilles en plastique. Toutes les régions devront d’ici à la fin juin avoir tenu de semblables réunions rassemblant associations de collectivités, metteur en marchés, recycleurs et associations, afin que le Gouvernement soit en mesure d’arrêter ses positions sur la question.
Des signes positifs au niveau européen
La représentation française auprès de la Commission Européenne semble désormais partager les réticences exprimées par la Plateforme et a fait savoir qu’elle ne souhaitait pas que la Commission impose une obligation de moyen pour améliorer les performances de collecte alors que traditionnellement l’UE impose des objectifs en laissant aux Etats-Membres le soin de choisir les moyens pour les atteindre.
Le Syctom est très actif à Bruxelles à ce sujet. Depuis janvier, il a alerté la Commission sur les effets pervers que l’instauration de ce dispositif fera supporter à la fois aux consommateur (renchérissement du prix de la bouteille sans possibilité assurée d’accéder à la déconsignation) et à l’environnement (+ 30% de hausse de consommation de boissons vendues en bouteille plastique depuis l’instauration de la consigne en Allemagne- source : Agence allemande de l’environnement).
Frédérique Ries (Rapporteure de Renew / Belgique) a repris une partie des amendements proposés par le Syctom concernant l’article 44 du projet de règlement. Son Rapport offre aux Etats la possibilité de ne pas mettre en place de dispositif de consigne dans le cas où ces derniers atteindraient 85 % de collecte (et non 90% comme prévu initialement par la Commission). Elle offre ainsi la possibilité à ces états de demander l’exemption de la mise en place de la consigne « recyclage » sous réserve d’assortir leur demande d’un plan d’action soumis à la commission.
Le principe d’une consigne pour recyclage : une fausse bonne idée
Si la captation des flux sur l’espace publique doit être réinterrogée, le principe d’une consigne pour recyclage est une fausse bonne idée d’un point de vue écologique, économique et sociétal.
- Ecologique parce que c’est réhabiliter le plastique alors qu’il faudrait tout faire pour le réduire et l’éliminer, en faisant, par exemple, la promotion de l’eau du robinet plutôt que de celle en bouteille. A ce titre, l’exemple allemand est parlant : la consigne pour recyclage a conduit à une augmentation de 30% de la production de plastique.
- Economique parce que cela instaurerait une double peine pour les consommateurs / contribuables : d’un côté, le prix d’achat des bouteilles en plastique augmenterait par la mise en place de la consigne et de l’autre, la perte des recettes du recyclage du plastique pour des syndicats publics de traitement comme le Syctom serait répercutée sur le budget des collectivités (et donc des ménages) alors que les syndicats de traitement ont conséquemment investis ces dernières années pour moderniser les centres de tri et les adapter aux nouveaux flux.
- Sociétal car depuis 1er janvier 2023 les règles de tri sont les mêmes sur tout le territoire français et les taux de recyclage plastique des ménages (la poubelle jaune) sont en hausse constante. Ce qui signifie que les règles de tri ont été comprises et assimilées et continuent de l’être. La mise en place de la consigne changerait à nouveau ces modalités. Il faudrait alors expliquer aux citoyennes et citoyens que ce qu’ils ont réussi à mettre en place ne serait plus valable… avec le risque de faire baisser la qualité du tri et les taux de recyclage.