"La grande majorité des recyclables ne sont toujours pas triés : 88 % des papiers, 86 % des bouteilles en plastiques, 60 % des cartons et même 53 % des bouteilles en verre..."

L’Île-de-France compte 18 installations d’incinération de déchets résiduels non dangereux. 3,8 millions de tonnes de déchets ont été accueillis en 2022, 60 000 tonnes de moins qu’en 2021.

Helder De Oliveira : C'est une bonne nouvelle si elle traduit un développement de la prévention des déchets et du tri en vue du recyclage. Mais elle peut aussi être le résultat d'un ralentissement économique et de la baisse du pouvoir d'achat.

Comment expliquer les baisses annoncées des capacités d'incinération (-9 % en 2024) et d'enfouissement (-56 % en 2028) des déchets non dangereux ?

H.D.O. : C’est la conséquence logique des objectifs de prévention et de recyclage. Tous les textes européens et français depuis 1975, tout comme le Plan régional des déchets, se donnent pour objectifs de prévenir les déchets, de développer le réemploi et le recyclage. L'incinération et l'enfouissement sont des solutions pour ce qui reste. Or, aujourd'hui, plus de la moitié de ce qui est incinéré aurait dû être évité ou trié en amont.
La grande majorité des recyclables ne sont toujours pas triés : 88 % des papiers, 86 % des bouteilles en plastiques, 60 % des cartons et même 53 % des bouteilles en verre ! L'Ordif - Institut Paris Région accompagne d'ailleurs le Syctom sur ce sujet. L'enjeu est d'améliorer le captage de ces déchets recyclables et celui des déchets alimentaires.

Comment qualifier les performances de récupération d’énergie du parc francilien, en termes de production de chaleur comme d’électricité ?

H.D.O. : C'est la spécialité régionale ! Les déchets ménagers y sont incinérés depuis un siècle et permettent de produire de l'énergie : de l'électricité pour les premières bennes à ordures mécanisées et de la chaleur pour le chauffage urbain.
Cette culture technique ancienne est très efficace. Elle évite de rejeter les déchets ménagers en-dehors de l'agglomération. La région a atteint dès 2017 les objectifs légaux de haute performance énergétique des incinérateurs prévus pour 2025.

La part des déchets résiduels franciliens enfouis est en recul avec 2,23 millions de tonnes en 2023 (3,42 en 2006). L’objectif de moins 50 % de déchets mis en décharge en 2025 avancé par la loi est-il atteignable ?

 H.D.O. : Si c'était facile, il serait déjà atteint ! En Île-de-France, l'enfouissement concerne principalement les déchets d'activités économiques. Cette filière bénéficie jusqu'à aujourd'hui d'un avantage compétitif en termes de prix et d'organisation : c'est moins cher pour celui qui jette et ça demande moins d'efforts. La règlementation récente essaie à petits pas de consolider les filières vertueuses : pollutaxes renforcées sur l'enfouissement comme la TGAP, incitations règlementaires (obligation de mise en place du tri, etc.), responsabilisation des metteurs sur le marché… Tout le monde espère pouvoir cueillir les fruits de ce nouvel écosystème qui s'installe peu à peu.

*L’Ordif, l’Observatoire régional des déchets d’Île-de-France, département de l’Institut Paris Région.

Retrouvez cette interview dans le Syctom mag n°83